Ce que je veux? Une carafe d'eau glacée.
Rien de plus. Nuit et jour, cette eau, dans ma pensée,
Ruisselle doucement comme d'une fontaine.
Elle est blanche, elle est bleue à force d'être fraîche.
Elle vient de la source ou d'une cruche pleine.
Elle a cet argent flou qui duvète les pêches.
Elle est de givre fin, de brouillard, de rosée,
Au cur de la carafe, elle rit. Elle perle
Sur son ventre poli, comme une sueur gaie.
En mille petits flots, pour rien, elle déferle,
Jaillit de chaque vasque en gerbes irisées.
Ce que je veux? Une carafe d'eau glacée.
Rien de plus. Nuit et jour, cette eau, dans ma pensée,
Ruisselle doucement comme d'une fontaine.
Elle danse au plafond, se complaît dans la glace,
Frappe aux carreaux avec la pluie. Ah! Ces cascades...
C'est le Niagara, vert bleu, vert Nil, vert jade,
C'est l'eau miraculeuse en un fleuve de grâce;
Toute l'eau des névés, des lacs, des mers nordiques,
Toute l'eau du Rocher de Moïse, l'eau pure
D'une oasis perdue au centre de l'Afrique;
Toute l'eau qui mugit, toute l'eau qui murmure,
Toute l'eau, toute l'eau du ciel et de la terre,
Toute l'eau concentrée au cur glacé d'un verre!
Je ne demande rien qu'un verre d'eau glacée...
Vous ne voyez donc pas mes doigts brûlants de fièvre,
Mes doigts tendus vers l'eau qui fuit? Mes pauvres lèvres
Sèches comme une plante à la tige cassée?
La soif qui me torture est celle des grands sables
Où galope toujours le simoun. Je ne pense
Qu'à ce filet d'eau merveilleuse, intarissable,
Où des poissons heureux circulent. Transparence,
Fraîcheur... Est-il rien d'autre au monde que j'implore?
Ce que je veux? Une carafe d'eau glacée.
Rien de plus. Nuit et jour, cette eau, dans ma pensée,
Ruisselle doucement comme d'une fontaine.
Ne puis-je boire au moins comme le pré, l'arbuste,
Le chien de la montagne au fil de l'eau qui court?
Cette eau... Cette eau, cette eau qui m'échappe toujours...
Ne m'accorderez-vous deux gouttes d'eau glacée?
Ce que je veux...